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quarta-feira, 17 de outubro de 2018

Apoiante então( na altura em que aqui foi entrevistado) do Podemos (que esiludido estará agora!) as ideias e o modelo crítico deste professor de filosofia aposentado com vários livros publicados, atacado pela direita e pela esquerda convencionais, devem ser conhecidas entre nós, nests país onde as polémicas de ideias chegam um século depois de haverem começado. O que é a Esquerda? Alguém questiona este passado? O que haverá de comum entre ela e a Direita liberal?

Entretien-fleuve avec Jean-Claude Michéa, le philosophe qui secoue la gauche

11/01/17 15h04
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Dans un essai stimulant, Notre ennemi le capital, le philosophe prophétise la fin proche et souhaitable du libéralisme. Et établit Podemos en modèle pour la gauche européenne. Entretien.
De nombreux intellectuels de gauche restent hermétiques, voire opposés, à vos écrits. Le dialogue est-il définitivement rompu ?
Jean-Claude Michéa – Si tel est le cas, je n’y suis pour rien ! Je ne refuserai évidemment jamais de débattre avec quelqu’un sous le seul prétexte qu’il serait “opposé à mes écrits”. Encore faut-il qu’il s’agisse d’un véritable débat et non d’une descente de police. Le problème – André Perrin l’a lumineusement montré dans ses incroyables Scènes de la vie intellectuelle en France –, c’est que l’ancienne culture du débat est aujourd’hui en passe de céder définitivement la place à celle de l’intimidation et de la chasse aux sorcières.
On juge beaucoup moins un auteur sur ce qu’il a réellement écrit (quand bien même il s’agirait d’un romancier comme Houellebecq) que sur les sombres intentions qu’on lui prête ou les usages nauséabonds qu’il est toujours possible de faire de son œuvre. Cette inquiétante dérive – qui en dit long, au passage, sur le sentiment de panique qui s’est emparé d’une partie du clergé universitaire et médiatique – ne peut naturellement conduire qu’à justifier “intellectuellement” les falsifications les plus grossières et les raccourcis les plus simplistes. J’en sais quelque chose.
Pourquoi les intellectuels “conservateurs” semblent avoir plus de facilité à se référer à vous que ceux que l’on qualifie de “gauche” ?
Pour la même raison, j’imagine, qu’un admirateur de Chesterton ou de Bernanos sympathisera toujours plus facilement avec un texte de Proudhon, de William Morris ou de Guy Debord qu’avec un essai de BHL, de Raphaël Glucksmann ou d’Alain Minc. Mais vous soulevez là, au fond, tout le problème des rapports historiques entre la « gauche » et le mouvement socialiste. La première, en effet, s’est toujours définie comme le "parti du mouvement", du "Progrès" et de l’"avant-garde" en tout. Parti dont l’ennemi premier ne peut donc être, par définition, que la "Réaction" ou "le vieux monde". Or si la critique socialiste originelle reprenait bien sûr à son compte la plupart des dénonciations de l’Ancien Régime et du pouvoir de l’Eglise, elle portait avant tout, au contraire, sur ce que Marx appelait la "loi du mouvement de la société moderne".
Loin de partager les illusions de la gauche du XIXe siècle sur les bienfaits de la nouvelle société industrielle et de son Droit abstrait, les penseurs socialistes les plus radicaux avaient donc compris, dès le début, le caractère fondamentalement ambigu de la notion de "Progrès" (qu’on songe par exemple à l’avenir que nous réservent, de nos jours, la Silicon Valley ou l’agriculture industrielle). C’est pourquoi toute pensée qui se voudrait encore "de gauche", et uniquement de gauche, s’expose inévitablement à toute une série de dérives suicidaires. Il n’est que trop facile, en effet, de confondre l’idée qu’"on n’arrête pas le Progrès" avec l’idée qu’on n’arrête pas le capitalisme. Telle est, selon moi, la racine philosophique la plus constante de toutes les mésaventures de la gauche moderne.
Le journaliste du Figaro Alexandre Devecchio consacre un chapitre de son livre, Les Nouveaux Enfants du siècle, à la “Génération Michéa” dans laquelle il range pêle-mêle : François Xavier Bellamy, Madeleine Bazin de Jessey, Mathieu Bock-Côté ou bien encore Eugénie Bastié. Que pensez-vous de cette classification ? Avez-vous le sentiment d’avoir influencé une nouvelle génération d’intellectuels ou de militants politiques ?
Si l’analyse de Devecchio est exacte, cela voudrait donc dire qu’un auteur qui a toujours refusé de participer à la moindre émission télévisée, dont les livres ne se vendent qu’à quelques milliers d’exemplaires - et non à des "dizaines de milliers" comme l’affirme régulièrement un Jean-Loup Amselle - et qui distille de surcroît au compte-goutte ses interviews aurait néanmoins le pouvoir d’influencer toute une "génération" ! J’avoue être très sceptique. Mais si tel était le cas, ce serait plutôt réconfortant. Cela prouverait au moins qu’il est encore possible de passer à travers les mailles du filet.
Selon vous, les classes populaires prennent conscience du fait que les deux grands partis du “bloc libéral” détruisent leurs acquis sociaux, et elles se réfugient dans l’abstention ou le vote “néo-boulangiste”. Comment faire de cette prise de conscience un levier pour une alternative “de gauche” ?

Les classes populaires subissent de plein fouet, par définition, toutes les nuisances du système capitaliste. Or, ce dernier, à la différence des sociétés antérieures, se caractérise avant tout par le fait – comme l’écrivait Karl Marx – que les relations entre les hommes y prennent essentiellement la forme d’un rapport entre les choses (le “fétichisme de la marchandise” n’étant que la manifestation quotidienne la plus visible de cette “réification”). En d’autres termes, la domination du capital est d’abord celle d’une logique anonyme et impersonnelle qui s’impose à tous, y compris aux élites elles-mêmes – quelles que soient par ailleurs la cupidité réelle et la vanité sans bornes de ces élites.
Jean-Claude Michéa, auteur de “Impasse Adam Smith”, Flammarion
En abandonnant définitivement, à la fin des années 1970, cette grille de lecture socialiste – pourtant plus actuelle que jamais, comme la crise de 2008 l’a encore amplement prouvé –, la gauche ne pouvait donc laisser aux classes populaires qu’une seule issue politique : personnaliser à l’extrême l’origine systémique de leurs souffrances quotidiennes et de leur exaspération grandissante en l’attribuant à la seule existence des immigrés, des Juifs ou de l’Etat fiscal. C’est bien ce renoncement à toute critique radicale de la dynamique déshumanisante et écologiquement destructrice du capitalisme qui explique, pour l’essentiel, les progrès constants du vote “néo-boulangiste”. Ce dernier ne prospère jamais, en effet, que sur ce que Renaud Garcia a si bien appelé le “désert de la critique”. Et ce ne sont certainement pas les sermons moralisateurs de l’élite médiatique et intellectuelle qui pourront y changer quoi que ce soit.
Vous défendez que retrouver la “radicalité” originelle de la gauche serait insuffisant pour regagner la confiance des classes populaires. Mais la posture “ni de gauche ni de droite” est occupée par Marine Le Pen et Emmanuel Macron. Dès lors, n’est-on pas dans une impasse ?

En 1874, les proscrits de la Commune réfugiés à Londres avaient tenu à rappeler à tous “ceux qui seraient tentés de l’oublier” que “Versaillais de gauche et Versaillais de droite doivent être égaux devant la haine du peuple”. Telle était effectivement, jusqu’à l’affaire Dreyfus, la position dominante du mouvement socialiste (en 1893, Jules Guesde et Paul Lafargue appelaient encore les prolétaires à chasser du pouvoir “les voleurs de gauche ou de droite”). Position radicale qu'on retrouve à l'identique, de nos jours, dans le célèbre slogan de Podemos: "nous ne sommes ni de gauche ni de droite, nous sommes ceux d'en bas contre ceux d'en haut".
Si Marine a pu si facilement retourner à son profit cette vieille maxime socialiste – tout en veillant, bien sûr, à en désamorcer les implications les plus radicales –, c’est donc bien, encore une fois, parce que la gauche, une fois actée sa conversion à l’économie de marché, lui a abandonné de fait le monopole de la dénonciation des effets économiques et culturels humainement et socialement destructeurs de la dynamique du capital (sans que le Front national ne renonce d’ailleurs pour autant au mythe de la “croissance”). Dénonciation de surcroît peu cohérente, puisqu’il va de soi qu’on ne peut pas célébrer à la fois l’unité nationale et la lutte des classes. Quant au “ni gauche ni droite” de Macron (il conviendrait de distinguer ici ce “ni gauche ni droite” d’en haut du “ni gauche  ni droite” d’en bas), c’est encore un autre problème. C’est dire – vous avez entièrement raison sur ce point – l’impasse dans laquelle nous nous trouvons !
Pourquoi faites-vous du dépassement du clivage gauche/droite la première des priorités politiques pour combattre le capitalisme ?

Pour deux raisons majeures. D’une part, le clivage gauche/droite, tel qu’il fonctionne aujourd’hui, conduit toujours à opposer un “peuple de gauche” à un “peuple de droite” (c’est d’ailleurs tout le sens de cette importation récente du système américain des primaires). Or, la seule ligne de démarcation politiquement féconde est celle qui inviterait, au contraire, à fédérer l’ensemble des classes populaires contre cette oligarchie libérale qui ne cesse de dissoudre leur mode de vie spécifique dans les “eaux glacées du calcul égoïste” (Marx).
D’autre part, ce clivage a aujourd’hui presque entièrement changé de sens. Il ne met plus aux prises, comme au XIXe siècle, les partisans d’un ordre divin sanctifiant les inégalités de naissance et les héritiers de la philosophie des Lumières. Il scinde au contraire celle-ci en deux camps officiellement rivaux. D’un côté ceux qui, dans la lignée d’Adam Smith et de Turgot, voient dans l’extension continue du marché le fondement premier de la liberté individuelle. De l’autre, ceux qui considèrent que c’est plutôt l’extension indéfinie des “droits de l’homme” qui en constitue le moteur principal. Mais à partir du moment où le libéralisme économique de la “droite” moderne doit être défini, selon la formule de Friedrich Hayek, comme le droit absolu “de produire, de vendre et d’acheter tout ce qui peut être produit ou vendu” (qu’il s’agisse d’une montre connectée, d’une dose de cocaïne ou du ventre d’une mère porteuse), il est clair qu’il ne pourra jamais se développer de façon intégralement cohérente sans prendre tôt ou tard appui sur le libéralisme culturel de la “gauche” (je laisse ici de côté l’usage purement électoral par une partie de la droite de la rhétorique conservatrice).
En d’autres termes, Hayek implique Foucault et Foucault implique Hayek. Autant dire que nous aurons donc de plus en plus affaire – si rien ne change – à ce que Debord appelait déjà “les fausses luttes spectaculaires des formes rivales du pouvoir séparé”. Luttes dont le seul vainqueur réel – Podemos l’a bien compris – ne peut être que le capital et son “mouvement incessant du gain toujours renouvelé” (Marx).
Pourquoi vous moquez-vous des intellectuels - comme François Cusset récemment - qui parlent de “droitisation de la société” ? Ce diagnostic vous semble-t-il infondé ?
 L’usage de ce concept médiatique souffre de deux défauts majeurs qui le privent de tout sens précis. D’une part, il invite à considérer la « société » comme un bloc homogène. Ce qui conduit à masquer le divorce croissant entre le discours modernisateur des élites du Système - dont le regard se tourne chaque jour un peu plus vers la Silicon Valley - et le rejet grandissant de ce même Système par les milieux populaires. De l’autre, il tend également à homogénéiser la notion de "droite". Or celle-ci est par définition plurielle. Elle peut tout aussi bien conduire à légitimer l’ubérisation intégrale de la vie, comme chez les libertariens, que le recours à l’Etat total, comme dans le fascisme. Mais peut-être, après tout, que ce concept de "droitisation" ne visait seulement que la redécouverte de ces valeurs dites "traditionnelles" qui - à l’image du sentiment d’appartenance, de l’exigence de civilité, ou du sens du passé - ont toujours contribué à freiner, dans les classes populaires, le processus d’atomisation du monde dont le capitalisme est structurellement porteur. Il ne représenterait alors qu’une des multiples façons dont les élites libérales ont coutume de stigmatiser le "repli sur soi" et le "passéisme" de ces classes "subalternes". Debord avait pourtant répondu d’avance à ce genre de critique. "Quant être absolument moderne - écrivait-il - est devenu une loi spéciale proclamé par le tyran, ce que l’honnête esclave craint plus que tout, c’est qu’on puisse le soupçonner d’être passéiste".
Quand il a renoncé à se représenter à la présidentielle, François Hollande a déclaré : “Le plus grand danger, c’est le protectionnisme”, l’assimilant ainsi au nationalisme. Pensez-vous que la majorité de la population soit encore sensible à cet avertissement ?

Le système capitaliste repose, par définition, sur la production sans cesse croissante de marchandises prioritairement destinées à être vendues sur un marché où la concurrence devrait théoriquement être libre et non faussée. Dans cette optique libérale, toute intervention protectionniste ne peut donc que compromettre la reproduction élargie du capital. Mais comme il est devenu plus difficile aujourd’hui – du fait de la fameuse “droitisation de la société” – de présenter cette libre concurrence capitaliste comme une valeur de gauche (c’est pourtant bien ce que faisait Hollande, en 1985, dans La gauche bouge), il apparaît donc désormais plus rentable, pour une gauche libérale, de prétendre que toute critique du libre-échange mondialisé procéderait, en réalité, d’un esprit “nationaliste” ou “fascisant”. On retrouve là, en somme, le vieux sophisme popularisé par BHL dans L’Idéologie française : si l’extrême droite dénonce le capitalisme, c’est bien la preuve que toute critique du capitalisme est d’extrême droite.
Même s’il ne concernait au départ que les classes moyennes des grandes métropoles, Nuit debout ne pouvait-il pas être un point de convergence avec les classes populaires ?
Le problème c’est que ce mouvement, en effet très prometteur au début, a été presque immédiatement noyauté par les éléments les plus caricaturaux de la gauche "radicale" parisienne (songeons aux célèbres "réunions non-mixtes" !). Et, du coup, présenté avec la plus grande bienveillance par la plupart des médias officiels. Ce qui n’était assurément pas le meilleur moyen d’élargir rapidement sa base sociologique et de rencontrer un écho enthousiaste dans la France périphérique !
Vous défendez le bilan de Podemos en estimant qu’il s’agit du “seul mouvement radical européen” à avoir compris l’impératif du dépassement des clivages traditionnels. Pourquoi ce modèle n’a-t-il pas été décliné dans d’autres pays d’Europe ? L’échec originel de Syriza en Grèce repose-t-il dans son ancrage à gauche ?

Le succès de Podemos s’explique avant tout par trois facteurs : l’ampleur de la crise économique espagnole, l’existence d’un groupe d’intellectuels nourris, à l’image de Pablo Iglesias et de Juan Carlos Monedero, de la lecture d’Antonio Gramsci et de la connaissance directe des luttes révolutionnaires d’Amérique latine, et la capacité corrélative de ces intellectuels à se mettre à l’écoute des classes populaires. De toute évidence, les autres pays d’Europe n’en sont pas encore là !
Quant à Syriza, fondé au départ sur des bases politiques voisines, son échec s’explique d’abord par le triomphe de la ligne de Tsípras sur celle de Varoufákis. Autrement dit, par l’illusion que l’oligarchie bruxelloise pourrait encore servir d’autres intérêts que ceux des marchés financiers internationaux. C’était vraiment mal connaître une Angela Merkel.
Vous écrivez que le système libéral “prend l’eau de toute part” et que sa disparition est “inévitable”. Sommes-nous dans une situation pré-révolutionnaire ? Quelle alternative politique pourrait s’y substituer ?

Le capitalisme postdémocratique se heurte aujourd’hui à trois limites majeures. La limite morale, car il détruit progressivement les bases anthropologiques de toute vie commune. La limite écologique, car une croissance infinie est évidemment impossible dans un monde fini. Et la limite systémique, parce que son entrée dans le règne du “capital fictif” – comme Ernst Lohoff et Norbert Trenkle l’ont établi de façon magistrale dans La Grande Dévalorisation – le rapproche à grands pas de son stade terminal.
Règne moderne du capital fictif qui s’explique lui-même par le fait que la reproduction élargie du capital repose désormais moins – du fait de l’innovation technologique incessante – sur le travail vivant des hommes que sur une pyramide de dettes qui ne pourront plus jamais être remboursées. Mais rien ne dit – dans ce champ de ruines que la gauche a laissé derrière elle – que la période de catastrophes qui s’annonce ainsi aura une fin heureuse. Elle peut tout aussi bien conduire à l’avènement d’un monde postcapitaliste qui marierait de façon inédite Brazil et Mad Max. Tel était déjà le sombre avertissement de Rosa Luxemburg, il y a plus d’un siècle.
Propos recueillis par Mathieu Dejean et David Doucet

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